Les deux composants du tissu
réticulé peuvent être
mis en évidence par l'éosine, qui colore les cellules
en rouge, et par une imprégnation à l'argent, qui
colore en noir les fibres collagènes de type III. Les fibres
dessinent un réseau à larges mailles ouvertes qui
contiennent de petites cellules sanguines rondes. Les cellules
réticulées sont accrochées aux fibres. Elles
sont allongées et leurs contours sont mal définis.
L'une d'entre elles est désignée par une flèche.
Dans les préparations habituelles, les cellules réticulées sont bien visibles, mais les fibres ne le sont pas. Les cellules réticulées, désignées par des flèches, sont étoilées et leurs prolongements dessinent un réseau superposable au réseau de fibres décrit dans l'image précédente. Deux faisceaux de fibres collagènes de type I, colorés en bleu, traversent la préparation.
Le tissu réticulé ne contient donc que deux des
trois constituants habituels des tissus conjonctifs. Il est dépourvu
de substance fondamentale. Les fibres argyrophiles sont formées
de collagène type III et disposées en réseau.
Les cellules réticulées sont accrochées aux
fibres et s'anastomosent par leurs prolongements. Le tissu réticulé
forme le squelette des ganglions lymphoïdes, de la rate et
de la moelle osseuse; ses mailles contiennent soit de la lymphe
soit des cellules sanguines.
2.4. Tissu adipeux
A l'oeil nu, le tissu adipeux paraît homogène et
nacré; il est, pour cette raison, appelé graisse
blanche. En voici dans la peau; les cellules sont groupées
en lobules séparés par des travées de tissu
conjonctif dense. Leur cytoplasme est presque entièrement
occupé par une volumineuse goutte lipidique qui refoule
le noyau, désigné par une flèche, contre
la membrane plasmique, d'où son nom de graisse uniloculaire.
On ne voit pas les triglycérides, car ils ont été
extraits lors de la déshydratation et de l'enrobage; il
ne reste, à leur emplacement, qu'une plage vide et donc
non colorée. Chaque lobule est desservi par une petite
artère qui se divise en un riche réseau capillaire
intralobulaire. La vascularisation n'est pas visible sur cette
image.
Lorsque les adipocytes sont jeunes et ne contiennent que peu de lipides, ceux-ci sont dispersés dans le cytoplasme sous forme de petites gouttelettes. Au fur et à mesure que la quantité de lipides augmente, les gouttelettes confluent pour finalement donner à la cellule son aspect uniloculaire caractéristique. La taille des cellules dépend de la quantité de lipides accumulés. Les vaisseaux peuvent être identifiés grâce à la présence de globules rouges, indiqués par des flèches.
Dans le tissu adipeux coloré à l'argent, seules les fibres reticulées sont mises en évidence. Les travées de tissu conjonctif dense délimitent cinq lobules. Dans chacun d'eux, l'emplacement des adipocytes est délimité par les fibres réticulées.
Le tissu adipeux est un tissu conjonctif où prédominent des cellules spécialisées dans l'accumulation des triglycérides, appelées cellules adipeuses ou adipocytes. Chaque adipocyte est entouré d'un réseau de fibres collagènes de type III. La graisse blanche est d'abord un réservoir d'énergie. En effet, les graisses ingérées lors d'un repas sont stockées sous forme de triglycérides dans les adipocytes, puis libérées dans le sang selon les besoins en énergie entre les repas. Elle permet donc une alimentation intermittente. Elle joue aussi un rôle d'isolant thermique et de protection mécanique.
Dans la graisse brune, les adipocytes diffèrent des précédents. Ils sont plus petits et contiennent de nombreuses gouttelettes lipidiques qui confluent rarement en une goutte unique. Ce sont des adipocytes de la graisse multiloculaire, appelée aussi graisse brune à cause de sa couleur naturelle, due aux cytochromes des nombreuses mitochondries.
La graisse brune est surtout abondante chez l'embryon.
Elle diminue au cours de la croissance et est réduite à
presque rien chez l'adulte. Les adipocytes de la graisse brune
contiennent de très nombreuses mitochondries capables d'oxyder
les acides gras très rapidement. L'énergie d'oxydation
n'y est pas utilisée pour la synthèse d'ATP, mais
est dégagée sous forme de chaleur. Ceci explique
le rôle de la graisse brune dans l'adaptation au froid chez
le nourrisson et chez les animaux qui hibernent.
2.5. Cartilage
Le cartilage constitue le squelette définitif de certains
poissons et le squelette provisoire des embryons de mammifères.
Chez ceux-ci, le cartilage est progressivement remplacé
par un squelette osseux. Chez l'adulte, des pièces squelettiques
cartilagineuses persistent dans l'oreille, le nez, le larynx,
la trachée et les bronches. Au niveau des surfaces articulaires,
il empêche, avec le liquide synovial, le frottement des
pièces osseuses l'une contre l'autre. Au niveau du cartilage
de conjugaison, il intervient dans la croissance des os longs.
Seules les pièces cartilagineuses du squelette sont représentées
dans ce schéma.
Les cellules du cartilage ou chondrocytes sont isolées dans de petites lacunes ou chondroplastes. Elles n'ont pas de forme particulière, mais épousent celle de leur cavité. Leur noyau volumineux est rond et possède un ou deux nucléoles. Leur cytoplasme est granuleux. Les chondroplastes sont séparés par la matrice organique.
L'aspect de la matrice permet de distinguer trois types de cartilage:
le cartilage hyalin, le cartilage fibreux et le cartilage
élastique.
Le cartilage hyalin est le plus fréquent; on l'appelle ainsi parce qu'il est vitreux à l'état frais. Sa matrice paraît homogène en microscopie optique parce que la partie fibrillaire est faite d'un feutrage de petites fibres collagènes de type II, responsables de la résistance du cartilage. Les glycosaminoglycanes de la substance fondamentale sont particulièrement riches en radicaux acides, ce qui explique la métachromasie du cartilage. Ces radicaux sont très hydrophiles, ce qui explique la haute teneur en eau et donc l'élasticité du cartilage.
Dans le cartilage fibreux, la composante fibrillaire est faite d'épais faisceaux de fibres collagènes de type I, donc bien visibles en microscopie optique. Ce cartilage ressemble donc à un tissu conjonctif dense; il n'en diffère que par ses chondrocytes, très différents de fibroblastes. Dans le cartilage élastique, propre à certains ligaments, ces faisceaux fibrillaires sont remplacés par des lames élastiques.
Toute pièce cartilagineuse, sauf le cartilage articulaire, est enveloppé d'une membrane, le périchondre, qui n'est bien développé que dans les pièces cartilagineuses en croissance. Il se trouve dans la partie supérieure de l'image; on lui décrit habituellement deux couches, mal délimitées l'une de l'autre. L'externe est plus riche en fibres collagènes. L'interne est riche en cellules mésenchymateuses.
Autour d'une pièce cartilagineuse qui n'est pas en croissance, le périchondre est fin et souvent réduit à une capsule conjonctive très mince.
La croissance du cartilage peut se faire de deux façons. Elle peut se faire en périphérie à partir des cellules mésenchymateuses du périchondre ou être interstitielle et se fait alors à partir des mitoses de chondrocytes.
Dans la croissance périphérique (A), le cartilage s'épaissit par apposition de couches externes issues du périchondre. Les cellules mésenchymateuses de la couche interne du périchondre se transforment en chondroblastes qui sécrètent de la matrice et s'enferment ainsi dans une logette. Dans la croissance interstitielle du cartilage (B), un chondrocyte se divise plusieurs fois de suite dans sa logette et, après chaque division, la cellule-fille sécrète de la matrice et s'éloigne ainsi de la cellule-mère. Les divisions peuvent se faire dans tous les sens et produisent alors un groupe isogénique coronaire. Elles peuvent se faire dans un sens déterminé et donnent naissance à un groupe isogénique axial. Les images suivantes sont des exemples de ces types de croissance. Au cours de l'apposition, les cellules mésenchymateuses internes du périchondre se transforment progressivement en chondrocytes.
Le groupe isogénique coronaire est formé dans le cartilage par multiplications successives d'un chondrocyte sans orientation déterminée.
Le groupe isogénique axial est également formé dans le cartilage par les divisions successives d'une cellule. Elles se réalisent de telle façon que les cellules-filles sont empilées les unes sur les autres.
Le cartilage peut subir de nombreuses modifications. Certaines sont anormales; l'apparition de fissures ou de structures fibrillaires inhabituelles sont des signes pathologiques de vieillissement ou de dégénérescence. D'autres sont physiologiques; la matrice du cartilage peut se calcifier lorsqu'elle doit servir de support à l'ossification ou lorsqu'elle donne insertion à un ligament.
Le cartilage est donc un tissu conjonctif entrant dans la composition
du squelette. Il est formé de chondrocytes isolés
dans une logette et d'une matrice organique importante dont la
composante fibrillaire détermine le type tissulaire. Sa
croissance se fait à partir du périchondre ou est
interstitielle.
2.6. Le tissu osseux
Le tissu osseux est un tissu conjonctif calcifié à
structure lamellaire. C'est le composant le plus important
du squelette. Il a donc avant tout un rôle de soutien et
de protection, mais il intervient aussi dans le métabolisme
des sels minéraux.
Le tissu osseux existe sous deux formes. Lorsqu'il paraît dense à l'oeil nu et dépourvu de cavités, on l'appelle "os compact". Lorsqu'au contraire, il est formé de minces travées disposées en réseau autour de nombreuses cavités, il a l'aspect d'une éponge et s'appelle "os spongieux". Dans cette coupe macroscopique d'un os long, l'os compact délimite entre autres la cavité de la partie droite du cliché; la partie supérieure contient surtout du tissu osseux spongieux.
Anatomiquement, on distingue trois types de pièces osseuses: l'os plat, l'os court et l'os long. L'os plat est formé de deux tables d'os compact séparées par une couche d'os spongieux, la diploé. L'os court, dont toutes les dimensions sont à peu près égales, est formé d'une masse spongieuse entourée d'une fine gaine d'os compact. L'os long comprend plusieurs parties. Ses deux extrémités ou épiphyses sont formées d'os spongieux entouré d'une lame d'os compact. La partie moyenne ou diaphyse est un cylindre d'os compact creusé d'une large cavité centrale, la cavité médullaire. Entre la partie moyenne et chaque extrémité se trouve une zone de transition, la métaphyse, occupée par le cartilage de conjugaison au cours de la croissance. Toute pièce osseuse est recouverte d'une membrane, le périoste. Les cavités internes sont tapissées par l'endoste, fine lame mésenchymateuse qui n'est pas visible à l'oeil nu.
Quelle que soit sa forme macroscopique, le tissu osseux est formé
de lamelles osseuses dont la disposition varie selon le type d'os.
L'épaisseur de ces lamelles peut atteindre 7 µm. Elles
sont parallèles et étroitement accollées
les unes aux autres. Elles contiennent de petites cavités
qui logent, chacune, un ostéocyte et sont reliées
entre elles par de fins canalicules. Cette structure lamellaire
est bien visible sur des coupes épaisses obtenues par usure.
La lamelle osseuse, l'unité du tissu osseux, est formée d'une matrice extracellulaire, comprenant une phase organique et une phase minérale, et de cellules. La phase organique est composée pour 90% de fibres collagènes et pour environ 10% de substance fondamentale. Celle-ci contient surtout de l'acide hyaluronique et des glycosaminoglycanes non associés en protéoglycanes. Sa teneur en eau, d'environ 25%, est très faible. Les fibres collagènes sont du type I et du type V. Toutes les fibres ont, dans leur lamelle, la même orientation, mais cette orientation change de lamelle en lamelle. Cette disposition des fibres collagènes est responsable de l'alternance de lamelles isotropes sombres et anisotropes claires dans un tissu osseux examiné en lumière polarisée.
La phase minérale est composée d'une fraction amorphe et d'une fraction cristalline. La fraction amorphe contient divers phosphates calciques. La fraction cristalline, la plus importante, est constituée de cristaux d'hydroxyapatite.
Le cristal d'hydroxyapatite, représenté en A, a l'aspect d'une longue aiguille. C'est un solide dont les atomes sont organisés en ensembles répétés régulièrement dans les trois dimensions de l'espace. L'unité du cristal est la maille; elle est représentée en C. La maille est un parallélipipède qui se définit par trois axes et trois angles. Trois mailles s'agencent en formant un prisme droit à base hexagonale. Ces prismes sont représentés à fort grossissement en B. Une série de prismes s'associe en un cristal. Les cristaux sont tassés les uns contre les autres, autour des fibres collagènes. La partie organique est donc entièrement emprisonnée dans la masse cristalline.
Il existe dans le tissu osseux trois types de cellules :
L'ostéoblaste est la cellule qui construit la lamelle
osseuse. Nous verrons plus loin que toute ostéogénèse
se fait contre un support. Le support de l'ostéogénèse
est représenté ici par une bande longitudinale colorée
en bleu. Les ostéoblastes se disposent contre ce support
en une couche continue de cellules cubiques. Leur cytoplasme est
intensément basophile, ce qui se traduit dans cette préparation
par une couleur violette. Cette basophilie est due à la
richesse en réticulum endoplasmique rugueux. Le noyau rond
a l'apparence d'une tache plus claire sur le fond sombre du cytoplasme
et est souvent situé au pôle cellulaire opposé
au support.
L'ostéoblaste a plusieurs fonctions. La principale est de produire la phase organique de la lamelle osseuse qui, tant qu'elle n'est pas calcifiée, s'appelle substance ostéoïde. Il sécrète aussi des phosphatases alcalines. Ces enzymes hydrolysent la gaine de polyphosphates qui enveloppe les fibres collagènes et inhibe la calcification. L'ostéoblaste intervient enfin dans la calcification elle-même. Il sécrète les premiers éléments minéraux sous la forme d'ions solubles qui précipitent en phase amorphe. Il intervient enfin dans la régulation de l'ostéolyse; il peut freiner l'activité des ostéoclastes en sécrétant une prostaglandine; il peut aussi la renforcer en sécrétant un facteur qui augmente la mobilité des ostéoclastes et une collagénase qui détruit les fibres collagènes.
Les ostéoblastes proviennent de cellules mésenchymateuses prédéterminées, appelées cellules ostéoprogénitrices. Seule leur situation à proximité d'autres cellules osseuses permet de les identifier dans les préparations classiques. Elles se trouvent ici dans le tissu conjonctif muqueux, entre le vaisseau sanguin et la rangée d'ostéoblastes.
L'ostéoblaste est donc la cellule de l'os en formation.
Il élabore la phase organique, produit des phosphatases
alcalines et intervient dans la calcification et la régulation
de l'ostéolyse. Il provient d'une cellule mésenchymateuse.
Ostéocyte
L'ostéoblaste, en sécrétant la phase organique,
s'enferme progressivement dans sa propre production. Il devient
alors un ostéocyte ou cellule de l'os formé. Chaque
ostéocyte est logé dans une petite cavité
ou lacune. Les lacunes à bords lisses contiennent des ostéocytes
jeunes qui achèvent le dépôt qu'ils avaient
entamé lorsqu'ils étaient encore ostéoblastes.
Les lacunes à bords plus irréguliers contiennent
des ostéocytes âgés.
Les ostéocytes épousent la forme de leur cavité. Leurs longs prolongements cytoplasmiques s'enfoncent dans les canalicules qui, d'une lamelle à l'autre, unissent les lacunes. Dans ces canalicules, les prolongements de cellules voisines sont unis par des jonctions communicantes et enveloppés, comme l'ostéocyte lui-même, d'un revêtement externe, représenté en rouge dans le schéma. La masse du tissu osseux est ainsi occupée par un réseau cellulaire important.
L'ostéocyte a une double fonction. L'ostéocyte jeune termine la synthèse entamée par l'ostéoblaste. L'ostéocyte âgé exerce, au moyen de son système lysosomial, une activité ostéolytique importante. Cette double fonction est sous le contrôle hormonal de la parathormone et de la calcitonine. Les ostéocytes interviennent donc dans les échanges ioniques.
L'ostéocyte est donc la cellule de l'os formé.
Il est inclus dans une logette et ses nombreux prolongements s'insinuent
dans les canalicules de la lamelle osseuse. Il participe à
l'ostéogénèse et à l'ostéolyse.
Ostéoclaste
Dans cette travée osseuse photographiée à
faible grossissement, les points clairs sont des lacunes ostéocytaires.
Le bord inférieur de la travée est limité
par une ligne bleue de substance ostéoïde contre laquelle
sont alignés des ostéoblastes. Le bord supérieur
est marqué par plusieurs érosions occupées
par de grandes cellules multinucléées. Ce sont des
ostéoclastes et les dépressions creusées
dans la travée sont des lacunes de Howship.
L'ostéoclaste, vu à plus fort grossissement, coiffe une lame osseuse et s'applique contre elle à la manière d'une ventouse. La région de la cellule proche de l'os est claire parce que remplie de vacuoles. Les noyaux sont tassés du côté opposé.
Du côté de la travée osseuse, la membrane plasmique de l'ostéoclaste a l'aspect d'une bordure en brosse. Elle est formée de nombreux replis délimitant les canalicules qui s'enfoncent à l'intérieur du cytoplasme. L'ostéoclaste libère par exocytose des hydrolases acides et les protons nécessaires à l'activité de ces enzymes. Les protons dissolvent les cristaux d'apatite, puis dissocient les fibres collagènes qui sont ensuite détruites par les hydrolases. Les produits de dégradation sont endocytés par la cellule et les ions sont remis en circulation. L'ostéoclaste participe ainsi au maintien du taux normal du calcium et des phosphates dans le plasma sanguin. Cette fonction est contrôlée par la parathormone et la calcitonine.
Les ostéoclastes sont donc des cellules géantes plurinucléées, responsables de la résorption osseuse massive. Ils ont leur origine dans la moelle osseuse et proviennent d'une lignée particulière de monocytes.
Vous terminerez votre étude en analysant les quatre dernières images. De quel(s) tissu(s) s'agit-il et pourquoi?
Leçon suivante: Elaboration d'une lamelle osseuse