L'hématopoïèse est continue tout au long de
la vie. Elle se fait dans les organes hématopoïétiques,
à partir de la différenciation de cellules mésenchymateuses.
Les organes hématopoïétiques changent en fonction
des périodes de la vie. Pendant la
période prénatale,
vers la deuxième semaine, l'hématopoïèse
débute dans le sac vitellin et produit uniquement des globules
rouges nucléés. Elle se poursuit dans le foie qui
produit des globules rouges anucléés ou érythrocytes,
des précurseurs des plaquettes et quelques leucocytes.
La rate est aussi le site de l'hématopoïèse,
pendant une période relativement brève. A partir
du quatrième mois, la moelle osseuse est l'organe hématopoïétique
principal; elle le demeure après la naissance.
La moelle osseuse est abondante dans les cavités de l'os spongieux des os courts et des os plats, et celles des épiphyses et des métaphyses des os longs. Elle est rare dans la cavité diaphysaire des os longs. Dans cette métaphyse, les travées d'os spongieux sont aisément reconnaissables. Elles sont plus denses et plus rapprochées dans la partie droite; la moelle par contre est plus abondante dans la partie gauche.
Dans cette coupe de moelle osseuse, examinée à faible grossissement, Il est difficile d'identifier les différents types cellulaires. On reconnaît néanmoins les précurseurs des plaquettes sanguines, les mégacaryocytes, qui sont volumineux et possèdent un noyau plurilobé. Les plages claires représentent des adipocytes.
A plus fort grossissement, on peut reconnaître plusieurs cellules sanguines différenciées et notamment des polynucléaires et des lymphocytes. Parmi elles se trouvent des cellules non différenciées. Celles qui sont le plus aisément identifiables appartiennent à la lignée des polynucléaires éosinophiles parce que leur cytoplasme est rempli de granulations rouges. Le centre de l'image est occupé par un large vaisseau dont l'endothélium est très aplati et discontinu; c'est un sinusoïde veineux, caractéristique de la moelle osseuse. A droite de ce sinusoïde se trouve une grande cellule où l'on reconnaît un noyau à plusieurs lobes; ici encore, il s'agit d'un précurseur des plaquettes sanguines.
Les cellules mésenchymateuses, qui sont à l'origine de la moelle, se différencient en cellules stromales et en précurseurs des cellules sanguines. Les cellules stromales comportent les cellules réticulées, les cellules endothéliales et les adipocytes.
Dans la moelle osseuse, les cellules mésenchymateuses destinées à se différencier en cellules sanguines sont appelées cellules souches. Lorsqu'elles sont capables de donner naissance à plusieurs types cellulaires, elles sont dites pluripotentes. Les cellules souches pluripotentes se divisent et produisent des cellules unipotentes, programmées pour produire chacune un type cellulaire déterminé. Ces différents types cellulaires peuvent être classés en différentes lignées. La lignée lymphoïde produit les lymphocytes, la lignée érythrocytaire produit les érythrocytes, la lignée plaquettaire produit les plaquettes sanguines, la lignée granulo-monocytaire produit les granulocytes et les monocytes.
La cellule unipotente morphologiquement identifiable dans la lignée
érythrocytaire est le proérythroblaste. C'est une
volumineuse cellule. Son diamètre varie entre 14 et 20
µm. Le noyau est rond et central; sa chromatine est bien
dessinée. Le cytoplasme, riche en ribosomes, est très
basophile.
Le proérythroblaste se divise pour produire des érythroblastes basophiles. Voici deux érythroblastes basophiles. Ils sont plus petits que le proérythroblaste. Leur diamètre varie entre 10 et 18 µm. La chromatine commence à se condenser; les nucléoles sont visibles. Le cytoplasme est basophile.
L'érythroblaste basophile se divise et, dans son cytoplasme, apparaissent les premières traces d'un pigment, l'hémoglobine. Il devient alors un érythroblaste polychromatophile, parce que la coloration de son cytoplasme est intermédiaire entre celle du basophile et celle de l'acidophile. L'érythroblaste polychromatophile est plus petit; il se divise plusieurs fois. Au fur et à mesure de ces divisions, sa chromatine se condense et les nucléoles deviennent moins visibles; la basophilie du cytoplasme diminue car la cellule ne synthétise plus de ribosomes et la quantité d'hémoglobine augmente progressivement.
Lorsque l'hémoglobine remplit tout le cytoplasme, l'érythroblaste polychromatophile devient acidophile. Son diamètre varie entre 7 et 14 µm. Son noyau est d'abord central et sa chromatine est condensée en quelques blocs. Après quelques divisions, le noyau devient pycnotique et excentrique. Le cytoplasme, rempli d'hémoglobine, contient encore quelques ribosomes et quelques mitochondries.
A la fin de cette évolution, le noyau est expulsé, enveloppé d'un fin film de cytoplasme; il se trouve en haut et à droite dans l'image. La portion anucléée est alors un jeune globule rouge ou réticulocyte. Il sera libéré dans la circulation sanguine.
Les érythrocytes proviennent donc de précurseurs médullaires. Leur évolution, stimulée par l'érythropoïétine, comporte plusieurs aspects.
Chez l'adulte normal, les réticulocytes représentent moins de 1% du nombre total de globules rouges. Le contrôle de la prolifération et de la différenciation des précurseurs des érythrocytes est hormonal. Une baisse de la concentration sanguine en oxygène ou une déperdition sanguine stimule la sécrétion de l'érythropoïétine par le rein. Celle-ci accélère la division et la transformation des érythroblastes.
Le précurseur immédiat des plaquettes sanguines
est une très grande cellule, le mégacaryocyte. Son
noyau polyploïde est le résultat d'une suite d'endomitoses;
il est composé de nombreux lobes reliés entre eux
et disposés en couronne. Il provient d'une cellule souche
beaucoup plus petite et diploïde où la synthèse
et la duplication d'ADN n'ont pas été suivies de
caryocinèse, ni de cytocinèse, ce qui explique la
polyploïdie et le volume très important de la cellule,
que l'on apprécie particulièrement dans un frottis
médullaire. Ici, le cytoplasme est granuleux parce que
la cellule est presque au terme de son évolution.
Dans une coupe de moelle osseuse, on reconnaît facilement un mégacaryocyte même si l'on n'observe pas la totalité de son volume. La cellule est grande; son cytoplasme est acidophile; son noyau est plurilobé et beaucoup moins dense que le noyau des petites cellules avoisinantes.
Le cytoplasme du mégacaryocyte est caractéristique. Il est rempli de granules et possède un système membranaire très développé. Les grains sont ceux décrits dans les plaquettes sanguines; les plus nombreux sont les grains alpha qui possèdent un nucléoïde; les corps denses sont rares. Les nombreux saccules membranaires, actuellement dispersés et sans orientation précise, seront à l'origine d'un véritable système de démarcation.
Lorsque le système de démarcation s'organise, le mégacaryocyte est dit thrombocytogène, parce qu'il est sur le point de libérer ses plaquettes. Les tubules s'alignent et délimitent des "champs plaquettaires" dont le centre est occupé par les granules.
Pour former les plaquettes sanguines, les mégacaryocytes émettent des pseudopodes qui s'insinuent dans les interstices des sinusoïdes veineux. Les membranes de démarcation fusionnent avec la membrane plasmique et fragmentent ainsi le cytoplasme. Ces fragments cytoplasmiques, libérés dans la lumière vasculaire, sont les plaquettes sanguines. La portion nucléée reste dans la moelle osseuse et devient la proie des macrophages. Cette thrombocytopoïèse est stimulée lorsque le nombre des plaquettes diminue dans le sang.
L'origine des plaquettes sanguines est donc le mégacaryocyte de la moelle osseuse, cellule très volumineuse au noyau polyploïde. Les plaquettes sanguines proviennent de la fragmentation de son cytoplasme, grâce à un système tubulaire de démarcation.
La lignée granulo-monocytaire produit les polynucléaires neutrophiles, éosinophiles et basophiles et les monocytes.
Dans la lignée monocytaire, la cellule unipotente identifiable dans un frottis médullaire est le monoblaste qui ressemble au myéloblaste. Il se divise pour former des promonocytes. Le promonocyte engendre des monocytes, qui ne se divisent plus, passent dans le sang, puis dans les tissus où ils deviennent des macrophages.
Dans la lignée granulocytaire, la cellule unipotente identifiable
dans un frottis médullaire est le myéloblaste. Son
diamètre varie entre 15 et 18 µm. Son noyau est excentrique,
accolé à la membrane plasmique, et les zones nucléolaires
y sont nettement délimitées. Le rapport nucléo-cytoplasmique
est élevé. Son cytoplasme est très basophile.
Le myéloblaste se divise pour donner des promyélocytes. Le promyélocyte est une cellule plus grande. Son diamètre varie entre 16 et 20 µm. Sa chromatine est bien dessinée. Le rapport nucléo-cytoplasmique est plus faible qu'au stade précédent. Son cytoplasme basophile contient des grains azurophiles, de couleur rougeâtre. En évoluant, le promyélocyte diminue de volume et son noyau se condense.
Le promyélocyte se divise pour donner des myélocytes. Si le stade de promyélocyte est caractérisé par la présence de grains azurophiles, celui de myélocyte est caractérisé par la présence des grains spécifiques neutrophiles, éosinophiles ou basophiles. Le myélocyte basophile est évidemment rarissime. Dans le myélocyte, le noyau est encore arrondi; il devient un métamyélocyte lorsque son noyau est échancré.
Le myélocyte neutrophile est plus petit que le promyélocyte. Son noyau est dense; le rapport nucléo-cytoplasmique est faible. Le cytoplasme est légèrement basophile. Il contient de nombreux grains spécifiques, à la limite de la visibilité optique. Les grains plus épais sont des grains azurophiles. Le myélocyte neutrophile devient un métamyélocyte neutrophile.
Voici deux métamyélocytes neutrophiles. Ils sont plus petits que le myélocyte. Le rapport nucléo-cytoplasmique est faible; le noyau est échancré et très condensé; les grains spécifiques neutrophiles donnent au cytoplasme un aspect poussiéreux. La lobulation du noyau se poursuivant, le métamyélocyte devient un polynucléaire neutrophile qui passe dans la circulation sanguine.
Les myélocytes éosinophiles sont moins nombreux que les myélocytes neutrophiles. Leur cytoplasme est masqué par les nombreux grains spécifiques éosinophiles et très volumineux.
Le métamyélocyte éosinophile est plus petit que le myélocyte éosinophile. Son noyau est échancré, sa chromatine très condensée. Son cytoplasme est à peine visible car rempli de gros grains éosinophiles. La lobulation du noyau se poursuivant, le métamyélocyte devient un polynucléaire éosinophile qui passe dans la circulation sanguine.
Tous les polynucléaires proviennent donc d'un précurseur commun, le myéloblaste. Celui-ci, en se divisant, produit des promyélocytes, dont le cytoplasme se garnit de grains azurophiles. A leur tour, les promyélocytes produisent des myélocytes caractérisés par la présence de grains spécifiques. Les myélocytes, en se divisant, produisent des métamyélocytes, au noyau échancré. Ceux-ci ne se divisent plus et deviennent des polynucléaires, au noyau plurilobé. Au cours de cette évolution, les cellules deviennent de plus en plus petites, et la quantité de réticulum endoplasmique rugueux et donc leur basophilie diminuent.
Pour terminer cette étude de la moelle osseuse et de l'hématopoièse, essayez d'identifier les cellules représentées dans les images suivantes.
Les prochaines leçons seront consacrées au tissu nerveux.