Le système digestif (Cours 1 et 2)


Introduction

Le système digestif est un ensemble d'organes dérivant presque tous de l'endoderme. Seuls la bouche et l'anus sont d'origine mixte: endo- et ectodermique. D'un point de vue anatomique, la cavité buccale est la première partie du système. Elle est suivie du tube digestif proprement dit composé d'une série de segments. Plusieurs glandes annexes déversent leur produit dans la lumière de ce tube.

1. Cavité buccale

1.1 Anatomie

La cavité buccale représentée ici en coupe sagittale possède:

La cavité buccale est divisée en deux parties inégales par les arcades dentaires. La partie externe (1) ou vestibule buccal est la fente située entre les arcades dentaires d'une part, les joues et les lèvres d'autre part. La partie centrale (2) est la cavité buccale proprement dite.

Toute la cavité buccale est tapissée d'un épithélium pavimenteux stratifié de type épidermoïde, kératinisé seulement au niveau de la langue. Cet épithélium repose sur un chorion dense dont l'importance varie d'une région à l'autre. Ce chorion est infiltré de petites glandes salivaires sauf au niveau des gencives. Ensemble, l'épithélium et son chorion, forment la muqueuse buccale.

1.2. Microanatomie

Voici cette muqueuse au niveau du palais. L'épithélium est pavimenteux stratifié de type épidermoïde et repose sur un chorion dense très vascularisé. Il est habituellement infiltré de petites glandes salivaires appelées "glandes palatines"; elles n'existent pas dans cette préparation. Ce chorion se confond en profondeur avec le périoste de la pièce osseuse qu'il recouvre.

La muqueuse au niveau des parties molles est plus épaisse. Dans cette coupe de lèvre, elle double une couche musculaire. Ces fibres musculaires striées appartiennent aux muscles peauciers. En dehors d'eux, se trouve la peau formée successivement du derme, riche en glandes sudoripares et sébacées, puis de l'épiderme.

La région postérieure de la cavité buccale communique avec le pharynx où se combinent les voies respiratoires et digestives. Il est subdivisé en trois parties : la partie supérieure est appelée nasopharynx (1), la partie moyenne est l'oropharynx (2) et la partie inférieure, le laryngopharynx (3). L'épithélium du nasopharynx est respiratoire, donc cylindrique pseudostratifié alors qu'ailleurs, l'épithélium est épidermoïde comme dans la cavité buccale et l'oesophage. Le chorion, très dense, forme l'aponévrose pharyngienne. Son épaisseur et la distribution des glandes mixtes ou séreuses qui l'infiltrent varient suivant les endroits. Il est doublé de nombreux muscles squelettiques.

Les annexes spécialisées de la cavité buccale sont: les dents, la langue, les glandes salivaires qui seront étudiées avec les glandes annexes du système digestif, et les amygdales qui font partie du système lymphoïde.

1.3. Les dents

Les dents sont des organes minéralisés de consistance très dure, implantés dans les maxillaires et servant à la mastication.

1.3.1. Disposition générale

D'un point de vue anatomique, la dent comprend trois parties : la couronne qui est la partie visible, la racine incluse dans une logette osseuse, l'alvéole dentaire, et le collet qui unit la racine à la couronne.

Les dents sont classées d'après leur forme et leur situation en incisives, canines, prémolaires et molaires. Les incisives sont antérieures, leur couronne est tranchante et leur racine est simple. Les canines sont latérales, leur couronne est pointue et leur racine est simple. Les prémolaires sont latérales, leur couronne est cubique et possède une face triturante munie de deux tubercules ou cuspides. Leur racine est généralement simple. Les molaires sont postérieures, leur couronne est cubique et possède une face triturante formée de quatre cuspides. Leurs racines sont doubles ou triples. Dans cette diapositive, les dents sont vues par leur face interne.

Le nombre de dents se calcule par demi-face et s'exprime par la formule dentaire. Elle est différente dans la dentition de lait et dans la dentition définitive. Dans la dentition de lait, il y a dans chaque demi-mâchoire deux incisives, une canine et deux prémolaires. Dans la dentition définitive, il y a dans chaque demi-mâchoire, deux incisives, une canine, deux prémolaires et trois molaires.

Pendant l'enfance, les deux dentitions coexistent. Cette radiographie le démontre: certaines dents définitives sont encore incluses sous les racines des dents de lait. L'éruption des dents s'étend depuis le quatrième mois jusqu'à la vingtième année. La première molaire définitive est en position occlusale à l'âge de six ans.

La dent est creusée d'une cavité centrale, la cavité pulpaire (1), qui s'ouvre à l'extrémité de la racine par l'apex (2). Elle est entourée d'une substance minéralisée, la dentine (3), couverte au niveau de la couronne par l'émail (4) et au niveau de la racine par le cément (5). Le ligament alvéolo-dentaire (6) formé de faisceaux fibreux joint les parois de l'alvéole (7) au cément de la racine.

1.3.2. Formation

Pour mieux comprendre la structure de la dent, il est nécessaire de connaître sa genèse. Voici quelles en sont les différentes étapes.

Au premier mois de la vie embryonnaire, la cavité buccale primitive (1) est entourée du deuxième arc branchial, l'arc mandibulaire (2), d'où sont issus les bourgeons qui forment l'arc maxillaire (3). Elle est surplombée par la saillie du cerveau primitif (4).

Les deux arcs sont composés d'une masse mésenchymateuse, enveloppée d'une lame ectoblastique. Les trois schémas représentent trois stades précoces de leur évolution.

En A : une coulée ectoblastique s'enfonce dans le mésenchyme sous-jacent : c'est le mur plongeant.

En B : cette coulée se creuse et la fente ainsi formée devient en s'élargissant le vestibule buccal qui sépare la partie externe (futures lèvres ou futures joues) de la partie interne (futur maxillaire). A partir du mur plongeant naît une deuxième coulée ectoblastique, la lame dentaire, qui s'enfonce aussi dans le mésenchyme.

En C : la lame dentaire produit en certains points de petits nodules épithéliaux, les premiers bourgeons dentaires. Dès que les bourgeons sont formés, la lame dentaire dégénère. Seule sa partie interne persiste pour donner une deuxième série de bourgeons (flèche), ceux des dents définitives en dedans des précédents.

1.3.3. Bourgeon dentaire

Le bourgeon épithélial (A) naît de la lame dentaire ectoblastique. Il induit la condensation du mésenchyme voisin en une papille (B). Essentiellement mésoblastique, cette papille contient quelques cellules ectoblastiques en provenance des crêtes neurales et représentées en vert dans le schéma. Entretemps, la lame dentaire produit un deuxième bourgeon, celui de la dent définitive. En C, le bourgeon initial se déprime en cloche et devient l'organe adamantin. La lame dentaire dégénère. Le tissu mésenchymateux s'organise autour de l'organe adamantin et de la papille; il devient le sac dentaire.

Ces trois ébauches primitives sont à l'origine de la dent. L'organe adamantin, ectoblastique, produira l'émail. La papille, ectomésoblastique, produira la pulpe et la dentine. Le sac dentaire, mésoblastique, produira le cément et le ligament alvéolo-dentaire.

L'organe adamantin est l'inducteur de l'évolution dentaire. Son bord (1) comprend deux couches cellulaires accolées. Il induira la formation de la racine. Ailleurs (2), l'organe adamantin, formé de trois couches cellulaires, est à l'origine de la couronne.

Voici la coupe qui correspond au schéma de l'image précédente. L'organe adamantin comprend trois couches. Le mur externe est une lamelle irrégulière de petites cellules. Il est en rapport avec le sac dentaire. La couche moyenne est appelée "reticulum adamantin'' parce qu'elle est formée de petites cellules étoilées anastomosées les unes aux autres en un réseau dont les mailles contiennent une substance riche en mucopolysaccharides. Le mur interne est une palissade de cellules cylindriques relativement hautes, les préadamantoblastes, en relation avec la papille mésenchymateuse. A l'endroit ou les deux murs se rejoignent (flèche), le réticulum est très peu important et l'organe adamatin est pratiquement réduit à deux couches. Ces deux couches accolées forment le feuillet de Hertwig dont dépendra l'évolution de la racine.

En dedans du bourgeon que nous venons de décrire, se trouve l'ébauche du bourgeon de la dent définitive.

1.3.4. Formation de la couronne

Le principe général de la formation de la couronne est le suivant. Là où il existe du réticulum, les préadamantoblastes induisent d'abord la différenciation des cellules mésenchymateuses de la papille en odontoblastes. Ceux-ci produisent ensuite de la dentine. Au contact de cette première couche de dentine, les préadamantoblastes se transforment alors en adamantoblastes, cellules spécialisées dans la sécrétion de l'émail.

Schématisons ces différentes étapes.

Avant toute différenciation (schéma A), les préadamantoblastes forment dans l'organe adamantin une palissade entre le réticulum adamantin et la papille mésenchymateuse richement vascularisée. Très rapidement, (schéma B), ils induisent la différenciation des cellules mésenchymateuses adjacentes en odontoblastes. Une fois en place, (schéma C), les odontoblastes sécrètent la première couche de dentine. Ce premier dépôt de dentine induit immédiatement la transformation des préadamantoblastes en adamantoblastes. Ils s'allongent et changent de polarité. Dès leur différenciation, (schéma D), les adamantoblastes déposent une couche d'émail contre la face externe de la dentine. La présence du réticulum adamantin est indispensable à ce dépôt.

Les odontoblastes déposent une seconde couche de dentine à la face interne de la première (schéma 1) et peu après, les adamantoblastes déposent une seconde couche d'émail à la face externe de la première (schéma 2). Dès qu'ils sont entamés, ces deux processus continuent simultanément (schéma 3). Plusieurs couches d'émail et de dentine se déposent de telle façon que, par rapport à la papille, l'émail semble s'accroître de façon centrifuge et la dentine de façon centripète.

La croissance de l'émail écrase progressivement les adamantoblastes, le réticulum adamantin, le mur externe et le sac dentaire. Lorsque la production d'émail est suffisante, les quatre couches sont comprimées; elles dégénèrent et forment une lame contenant de nombreux débris cellulaires, la membrane de Nasmyth (flèche) éliminée lors de l'éruption. Puisqu'il n'y a plus d'adamantoblastes, la production d'émail s'arrête. La dentine, par contre, continue à être élaborée. Ses couches successives refoulent les odontoblastes vers le centre de la pulpe qui diminue sans cesse.

1.3.5. Formation de la racine

Avant son éruption, la dent ne possède qu'une racine incomplète. La formation de la racine définitive dépend du feuillet de Hertwig (flèche). Celui-ci est la seule partie de l'organe adamantin qui n'est pas éliminée lors de l'éruption. Il provient du bord périphérique de cet organe où mur interne et externe sont accolés.

La formation de la racine s'effectue en plusieurs étapes.

  1. Les préadamantoblastes induisent d'abord la formation d'odontoblastes. Ceux-ci produisent ensuite une couche de dentine.
  2. Parce qu'il n'y a pas de réticulum, la production d'émail est impossible; donc, les cellules du feuillet de Hertwig dégénèrent et la dentine induit alors la formation de cémentoblastes à partir des cellules mésenchymateuses du sac dentaire.
  3. Ceux-ci produisent du cément et se transforment en cémentocytes.

Le schéma A représente le feuillet de Hertwig. Son extrémité n'est pas différenciée. Elle sera le siège de nombreuses mitoses qui entraîneront sa migration progressive le long de la papille mésenchymateuse (1). Dans sa partie supérieure, il comprend les deux murs dont l'interne (2) est une palissade de quelques cellules équivalentes aux préadamantoblastes décrits au niveau de la couronne. En dehors du feuillet de Hertwig se trouve le sac dentaire (3).

Les schémas suivants expliquent comment la racine croît segment par segment. Dans chaque segment représenté, la suite des événements est identique. Pendant que le feuillet de Hertwig s'enfonce (schéma B), son mur interne induit la formation d'odontoblastes (4) dans la papille. Ces odontoblastes élaborent une première couche de dentine (5) (schéma C). Vu l'absence de réticulum adamantin, les cellules du feuillet qui ont induit la formation de ces premiers odontoblastes dégénèrent et le sac dentaire est en rapport immédiat avec la dentine (schéma D). Les cellules mésenchymateuses du sac dentaire prennent appui sur la dentine et se transforment en cémentoblastes (6) (schéma E). Ceux-ci se comportent comme des ostéoblastes : ils s'entourent de leur propre production, le cément et deviennent des cémentocytes (schéma F).

Résumé

La formation de la dent dépend donc de l'organe adamantin dont la première fonction est d'induire la transformation des cellules mésenchymateuses de la papille en odontoblastes. Au niveau de la couronne, il produit l'émail puis disparaît. La couronne est donc élaborée rapidement et sa taille ne sera plus modifiée après l'éruption dentaire. Au niveau de la racine, le feuillet de Hertwig est maintenu. Il induit la formation de la racine dont la croissance est progressive et ne s'arrêtera qu'au moment où le pouvoir mitotique du feuillet est épuisé.

1.3.6. Constituants de la dent et cellules productrices

1.3.6.1. Organe adamantin et émail

Les adamantoblastes sont des cellules d'origine ectoblastique et produisent l'émail. Ils proviennent de la différenciation du mur interne de l'organe adamantin.

Dans cette coupe de bourgeon dentaire, les trois couches de l'organe adamantin : le mur externe, le réticulum adamantin et le mur interne sont bien visibles. Les adamantoblastes du mur interne sont disposés régulièrement et appliqués contre la couche des tissus calcifiés. En-dedans de ceux-ci se trouvent les odontoblastes et la pulpe. L'ensemble est entouré par le tissu mésenchymateux du sac dentaire, très peu organisé à ce stade du développement.

Les adamantoblastes sont de hautes cellules cylindriques. Ils sont observés ici en coupe semi-fine, colorée au bleu de toluidine et agrandie environ 1.200 fois.

Le noyau est situé dans le pôle de la cellule orienté vers le réticulum adamantin, qui n'est pas visible sur la photo. Le pôle opposé est incrusté dans une bande, teinte en bleu foncé et qui représente les premières couches d'émail calcifié...

Le corps très grêle des adamantoblastes contient quelques points bleus de taille variable. Ce sont des corps adamantins. Seuls ceux dont le volume est suffisant, peuvent être observés à ce grossissement.

Le prolongement de Tomes est la petite partie plus claire de la cellule appliquée contre l'émail. Son extrémité est fréquemment insérée dans un espace conique qui, dans cette coupe, prend l'aspect d'une petite incisure en forme de V.

Les adamantoblastes sont unis entre eux par des complexes de jonction situés près de leurs deux pôles. Les complexes de jonction apicaux marquent la limite entre le corps cellulaire et le prolongement de Tomes. L'adamantoblaste, qui produit l'émail, possède les caractères d'une cellule sécrétrice: un réticulum endoplasmique rugueux important et un appareil de Golgi bien développé. Les mitochondries sont nombreuses au pôle basal de la cellule. Des granules denses limités par une membrane sont parsemés dans le cytoplasme et accumulés dans le prolongement de Tomes : ce sont les corps adamantins.

Cette suite de schémas explique la sécrétion des corps adamantins. Certains sont excrétés au niveau des faces latérales de la cellule. Ils seraient à l'origine de la substance interprismatique de l'émail. La plupart sont accumulés dans le prolongement de Tomes (schéma 1). L'excrétion en bloc de ces corps adamantins accumulés (schéma 2) produit un segment de prisme et la cellule semble décapitée. Mais elle reconstitue un prolongement (schéma 3) où s'accumule un nouvel amas de corps adamantins dont l'excrétion (schéma 4) produit un nouveau segment de prisme. La substance interprismatique et les prismes seront expliqués en décrivant la structure de l'émail.

L'émail est le tissu calcifié le plus dur de l'organisme. Il est d'origine ectoblastique et recouvre la dentine au niveau de la couronne.

Comme tout autre tissu minéralisé, l'émail possède une phase organique et une phase minérale. La phase organique ne représente cependant que 3 % de son volume et est dépourvue de collagène. La phase minérale est donc particulièrement importante. Elle est purement cristalline. Ses cristaux d'hydroxyapatite sont plus volumineux que dans les autres tissus minéralisés. L'émail contient aussi un pour mille de cristaux de fluoroapatite responsables de sa grande dureté.

A faible grossissement et sur coupe obtenue par usure, l'émail paraît strié de lignes perpendiculaires à la surface de la dent et de bandes moins nettes et plus ou moins parallèles à cette surface. Les premières délimitent les unités de l'émail appelées prismes. Les autres sont les lignes d'accrétion : elles marquent les dépôts successifs réalisés de façon synchrone par tous les adamantoblastes.

Le schéma suivant permet de les comprendre.

Les lignes perpendiculaires, flexueuses, s'étendent de la dentine à la surface de la dent. Elles délimitent un fragment d'émail, le prisme (1). La ligne elle-même est la membrane prismatique (2) et deux prismes sont séparés par une très étroite bande de substance interprismatique (3). Chaque prisme est formé par la superposition des petits segments (4) déposés successivement par un adamantoblaste. Parce que la production de tous les adamantoblastes est synchrone, les segments de prismes voisins sont régulièrement juxtaposés...

Cette juxtaposition détermine les lignes d'accrétion (5). Certaines sont plus épaisses que d'autres, elles traduisent un arrêt du dépôt et donc un trouble physiologique. L'une d'elles, la ligne néonatale, (6) est constante : elle marque le trouble physiologique profond de la naissance.

Le prisme peut donc se définir de deux façons. C'est d'une part, l'unité structurelle de l'émail. Il a la forme d'un bâtonnet sinueux qui s'étend de la jonction entre l'émail et la dentine jusqu'à la surface de la dent. Il résulte de la superposition d'une série de segments.

En coupe transversale, les prismes peuvent avoir des formes très diverses. La forme prismatique, d'où les prismes tirent leur nom, est classique mais plutôt rare. On observe parfois des sections transversales tout à fait circulaires ou en fer à cheval.

La subdivision de l'émail en prismes, membranes prismatiques et substance interprismatique ne repose sur la différenciation d'aucune structure précise au sens habituel du terme. Elle est due uniquement à la disposition des cristaux d'hydroxyapatite, perceptible dans cette micrographie électronique. Substance prismatique (A) et interprismatique (B) diffèrent donc essentiellement par l'orientation de leurs cristaux. La membrane prismatique est plus riche en substance organique et les cristaux y sont plus rares.

1.3.6.2. Odontoblastes, dentine et pulpe dentaire.

Les odontoblastes sont des cellules mésenchymateuses issues de la papille dentaire; elles produisent la dentine.

Les odontoblastes induits par les préadamantoblastes forment la couche externe de la papille. Le corps cellulaire est cylindrique et basophile. On peut y observer une tache plus claire due à l'importance du système de Golgi. Le noyau est situé au pôle basal, orienté vers la papille. Le pôle apical est appliqué contre une bande claire, la prédentine. Il est prolongé par une expansion très grêle, la fibre de Tomes, qui n'est pas visible dans cette coupe légèrement oblique. Elle s'insinue plus ou moins loin dans un petit canalicule dentinien qui s'étend jusqu'à l'émail.

Ce schéma explique l'ultrastructure des odontoblastes et démontre leur fonction sécrétoire. Le réticulum endoplasmique rugueux est particulièrement important et l'appareil de Golgi est bien développé. Le cytoplasme contient de larges vésicules claires et des grains de sécrétion. Les cellules sont unies entre elles par divers complexes de jonction le long de leurs faces latérales. Ils sont plus importants au pôle apical.

La dentine est une substance blanchâtre et dure. Elle est produite par les odontoblastes. Elle est traversée par de nombreux canalicules où se trouvent les fibres de Tomes, seuls éléments cellulaires de ce tissu.

Comme tous les tissus minéralisés, la dentine possède deux phases: une phase organique et une phase minérale. La phase organique représente 30 % de son volume et est composée de fibres collagènes et de substance fondamentale. La phase minérale est formée d'une fraction amorphe très importante riche en carbonates et d'une fraction cristalline constituée de cristaux d'hydroxyapatite.

Examinons la dentine dans une coupe de bourgeon dentaire colorée selon une méthode trichromique classique. Elle est située en périphérie de la papille mésenchymateuse. Sa couche interne, la plus mince, est colorée en bleu. C'est la couche la plus récente ou prédentine qui n'est pas minéralisée. La couche la plus épaisse est la dentine vraie minéralisée. Les deux couches sont parcourues de lignes parallèles, les canalicules dentiniens qui contiennent les fibres de Tomes. Ceux-ci permettent de différencier clairement la dentine de l'émail qui la recouvre.

Dans une dent adulte, et sur coupe longitudinale usée et colorée au bleu de toluidine, la distinction entre prédentine et dentine vraie n'est plus possible, au moins à ce faible grossissement. Les canalicules dentiniens sont ces fines lignes sombres et parallèles qui s'étendent de la cavité pulpaire à l'émail. Dans d'autres types de préparation, il est possible d'observer en outre des lignes parallèles à la surface. Ce sont les lignes d'accrétion et, comme dans l'émail et pour les mêmes raisons, la ligne néonatale est plus prononcée.

La dentine peut être subdivisée en dentines intertubulaire et péritubulaire.

La dentine intertubulaire est produite en plusieurs étapes. Les odontoblastes produisent du précollagène et les précurseurs de la substance fondamentale dont on retrouve les premières traces dans leurs vésicules et leurs grains de sécrétion. Les précurseurs déposés à la surface apicale des cellules forment une couche argentaffine, la prédentine précoce (schéma A). Pendant le dépôt d'une deuxième couche, la première se modifie, elle perd son affinité pour l'argent et devient la prédentine (schéma B). Dans une étape ultérieure (schéma C), des points de calcification ou calcosphérites apparaissent dans la matière organique. Ce début de calcification caractérise la dentine intermédiaire. Les calcosphérites croissent de façon radiaire et fusionnent. La dentine est ainsi entièrement calcifiée et devient la dentine vraie (schéma D).

A chaque dépôt d'une nouvelle couche, la fibre de Tomes s'accroît d'autant. La dentine péritubulaire n'est produite que dans la dentine intertubulaire calcifiée. Son mode de production est identique.

La distinction entre dentines intertubulaire et péritubulaire est nette dans une coupe transversale, examinée à fort grossissement.

La zone plus claire près de la pulpe est de la prédentine précoce (1). Elle est longée en-dehors par une bande de dentine intermédiaire (2). Les deux zones sont parsemées de petites cavités, les coupes des canalicules dentiniens. Certaines contiennent un point bleu, la fibre de Tomes. Dans la dentine intermédiaire, chaque canalicule est entouré d'un halo plus foncé que le tissu voisin. Ce halo correspond à la dentine péritubulaire qui n'est produite que dans les régions calcifiées de la dentine intertubulaire.

Le rythme et la régularité du dépôt permettent de distinguer plusieurs variétés de dentine. La dentine primaire est antérieure à l'éruption dentaire. Son dépôt est rapide et régulier. La dentine secondaire est postérieure à l'éruption dentaire. Son dépôt est lent et régulier. La dentine tertiaire est une dentine de réparation. Son dépôt est rapide et irrégulier.

La pulpe est un tissu mésenchymateux richement vascularisé et richement innervé. Elle est le reste de la papille dentaire embryonnaire et remplit la cavité centrale de la dent. Sa couche la plus externe est celle des odontoblastes appliqués contre la dentine, reconnaissable à ses tubules.

Son volume varie avec l'âge: considérable chez l'enfant, il diminue chez l'adulte et est réduit à rien chez le vieillard chez qui la pulpe finit même par disparaître complètement. L'innervation de la pulpe et de la dentine est mal connue. Une branche nerveuse se détache du nerf dentaire et pénètre par l'apex dans la pulpe. Elle y perd sa gaine de myéline et ses fibres se dirigent vers les odontoblastes autour desquels elles s'anastomosent en réseau. Quelques rameaux issus de ce réseau s'enroulent autour du corps d'un odontoblaste puis de sa fibre de Tomes dans le canalicule dentinien. Les autres restent dans la pulpe et enveloppent la base des odontoblastes.

La présence de fibres nerveuses dans quelques canalicules n'est pas suffisante pour expliquer la douleur dentinienne. Celle-ci est le résultat d'une action mécanique exercée par les cellules sur le plexus nerveux. Cette action est provoquée par l'aspiration de la fibre de Tomes dans le canalicule ou par son expulsion hors du canalicule.

1.3.6.3. Sac dentaire, cément et ligament alvéolo-dentaire

Le cément est un tissu minéralisé qui enveloppe la dentine au niveau de la racine. Il est élaboré par les cémentoblastes qui s'entourent de leur production et deviennent des cémentocytes. Parmi tous les tissus calcifiés de la dent, il est donc celui qui ressemble le plus au tissu osseux.

Il est formé de lamelles parallèles représentées ici à fort grossissement. Chacune d'elles est creusée de petites cavités où sont logés les cémentocytes. Ces logettes sont reliées entre elles par de fins canalicules.

Le cément (1) est uni à la paroi de la cavité alvéolaire (2) par des faisceaux fibreux dont l'ensemble est appelé "ligament alvéolo-dentaire". Les espaces relativement larges entre faisceaux fibrillaires sont occupés par des vaisseaux sanguins. Ce ligament assure le maintien de la dent dans son alvéole.

Nous avons ainsi terminé la description de la dent. La leçon prochaine sera consacrée à la langue et au début de l'étude du tube digestif proprement-dit.