Le système urinaire (cours 4)


7. Voies urinaires

Les voies urinaires commencent au niveau des calices (1) situés dans le sinus rénal. Les calices s'ouvrent dans le bassinet (2), localisé à hauteur du hile. Le bassinet se poursuit par l'uretère (3) qui s'abouche au bas-fond de la vessie (4). Du col vésical se détache un canal unique, l'urètre (5) qui débouche à l'extérieur.

7.1. Voies urinaires hautes

7.1.1. Rappel anatomique

Les calices sont les ramifications terminales de l'arbre pyélocaliciel représenté ici de façon schématique. Dans le rein humain, leur nombre varie entre 7 et 13. Ils ont la forme de petits entonnoirs qui, en position anatomique, coiffent les papilles rénales, c'est-à-dire les sommets des pyramides médullaires qui font protrusion dans le sinus rénal. Les espaces intercaliciels sont normalement comblés par du tissu adipeux dans lequel cheminent les branches des vaisseaux rénaux et des filets nerveux.

Chaque entonnoir caliciel comprend deux parties: une partie conique, appliquée contre la papille et dont les deux feuillets délimitent un espace péricaliciel, le fornix (1), et une partie tubuleuse, la tige calicielle (2), qui relie le fornix au bassinet ou à une de ses branches (3). Le feuillet interne de la partie conique, formé par un épithélium mince, de type urinaire dans certaines espèces, cylindrique dans d'autres, adhère fermement au parenchyme papillaire. Ce feuillet est criblé d'une vingtaine de pores qui sont l'abouchement des tubes collecteurs de Bellini par lesquels l'urine suinte dans le fornix. Le feuillet externe est formé par une paroi urinaire telle qu'elle sera décrite plus loin dans la coupe d'uretère; son adventice fibreuse est en continuité avec la capsule rénale qui tapisse le sinus.

Le bassinet recueille l'urine provenant des calices. Sa forme est sujette à des variations individuelles. Généralement on lui distingue 2 ou 3 branches principales formées par la fusion des tiges calicielles (schéma de gauche). Certains auteurs les appellent encore calices majeurs. Parfois, le bassinet a un aspect plus globuleux (schéma de droite). Enfin, toutes les variations intermédiaires entre la forme franchement ramifiée et la forme globuleuse peuvent être observées.

Le bassinet se continue par l'uretère qui conduit l'urine jusqu'à la vessie. Il s'agit d'un tube de 4 à 7 mm de diamètre et d'environ 30 cm de long. Classiquement on lui distingue quatre portions anatomiques : une abdominale, une iliaque, une pelvienne et une vésicale. A 1 ou 2 cm de la jonction pyélo­urétérale, se trouve un premier rétrécissement, le collet de l'uretère. A la jonction des 2 dernières portions se trouve un second rétrécissement, le rétrécissement iliaque, qui correspond à l'endroit où l'uretère croise les vaisseaux iliaques. Cette description est purement topographique, car la structure histologique est la même non seulement tout au long du tube urétéral mais aussi au niveau du bassinet et des calices.

7.1.2. Histologie

Voici la structure histologique des voies urinaires hautes, illustrée dans une coupe transversale de l'uretère. Lorsque, comme ici, l'uretère est vide, sa lumière a une forme étoilée, parce que découpée par des replis de sa paroi. Lors du passage de l'urine, ceux­ci se déplissent et l'uretère se dilate. La paroi urétérale est composée de trois couches: une muqueuse, une musculeuse et une adventice.

L'épithélium de la muqueuse est de type pluristratifié urinaire. Il repose sur un chorion fibro­élastique relativement épais, qui contient de petits vaisseaux sanguins, des lymphatiques et des éléments nerveux.

La tunique musculeuse est formée de faisceaux musculaires lisses, plus ou moins isolés les uns des autres par des travées conjonctives en continuité avec le chorion. Les faisceaux musculaires sont disposés en une couche interne longitudinale (dont les cellules sont coupées ici transversalement) et une couche externe circulaire (dont les cellules sont coupées ici longitudinalement). Dans le tiers inférieur de l'uretère, il existe une troisième couche longitudinale située en dehors des deux autres et qui est une expansion de la paroi vésicale.

En dehors de la musculeuse se trouve l'adventice, tunique conjonctive contenant des vaisseaux de plus gros calibre ainsi que quelques ganglions nerveux. L'adventice se continue par le tissu conjonctivo­adipeux rétropéritonéal.

La structure et la disposition des trois couches pariétales est donc la même tout au long des voies urinaires hautes. Seule leur épaisseur varie: peu importante au niveau des calices, elle augmente au fur et à mesure qu'on se rapproche de la vessie.

Remarquons enfin que la paroi des voies urinaires diffère de la paroi du tube digestif non seulement en ce qui concerne l'épithélium, mais encore par l'absence de muscularis mucosae et de sous­muqueuse et par la disposition inverse des couches musculeuses.

7.1.3. Histophysiologie

La contraction des couches musculeuses est responsable du péristaltisme de la paroi des voies urinaires qui accélère l'écoulement de l'urine. A certains endroits, les faisceaux musculaires ont aussi une fonction de sphincter. On distingue ainsi le sphincter du fornix (1) au sommet du cône caliciel, le sphincter du calice (2) à la base de la tige calicielle et le sphincter pyélique (3) à la jonction pyélo­urétérale. L'activité de ces sphincters facilite l'évacuation de l'urine et empêche son reflux. Dans un premier temps, le sphincter du fornix se relâche, tandis que celui du calice est contracte : l'urine s'accumule dans la cavité calicielle (A). Lorsque le calice est rempli, le sphincter du fornix se contracte pendant que celui du calice s'ouvre : l'urine s'écoule vers le bassinet (B). Les calices fonctionnent indépendamment les uns des autres. La vidange du bassinet n'a lieu que lorsque celui­ci est rempli jusqu'à un certain point. A ce moment le sphincter pyélique se relâche pendant que les sphincters caliciels et la musculature du bassinet se contractent : l'urine est évacuée vers l'uretère (C) le long duquel elle est propulsée par les mouvements péristaltiques de la paroi urétérale.

7.2. Vessie

7.2.1. Rappel anatomique

La vessie, vue ici en coupe sagittale médiane, est située dans l'excavation pelvienne immédiatement en arrière de la symphyse pubienne (1). C'est un viscère creux d'une capacité d'environ 350 à 500 ml. Son corps (2) est recouvert sur sa face supérieure en forme de dôme par le péritoine (3). Le corps s'amincit vers l'avant. Cette région, ou apex vésical (4), donne insertion au ligament ombilical médian (5) qui est le vestige fibreux de l'ouraque embryonnaire, reste du canal allantoïdien. Exceptionnellement ce canal persiste ou est perméable sur une étendue plus ou moins longue. Le fond de la vessie (6) est la région postéro­inférieure située à l'opposé de l'apex. Les uretères y aboutissent, chacun à l'extrémité d'un bourrelet horizontal, la barre urétérale (7). Le col vésical (8) est la partie basse, en forme d'entonnoir, d'où part l'urètre. La partie proximale de l'urètre masculin est engainée par la prostate (9).

La surface interne apparaît dans cette vessie ouverte et vue de face. La muqueuse y forme de nombreux plis, sauf au niveau d'une région triangulaire, légèrement surélevée, occupant le fond vésical et appelée trigone (1). A cet endroit, la muqueuse adhère intimement à la musculeuse et a de ce fait un aspect lisse. Les orifices urétéraux (2) apparaissent comme deux fentes étroites, chacune à un des angles supérieurs du trigone. Le repli plus accentué qui forme la base du triangle est la barre urétérale (3). Le sommet opposé à cette barre correspond à l'ostium de l'urètre (4).

7.2.2. Histologie

Du point de vue histologique, la paroi vésicale est formée de trois couches: une muqueuse, une musculeuse et une adventice. Sa structure est donc identique à celle des voies urinaires hautes, sauf en ce qui concerne son épaisseur, beaucoup plus importante.

La muqueuse comprend l'épithélium et le chorion. L'épithélium est pluristratifié, de type urinaire. On l'appelle encore épithélium transitionnel ou urothélium. Il est constitué de 5 à 8 couches cellulaires étroitement imbriquées. La couche superficielle est constituée de cellules volumineuses, souvent binucléées. Leur pôle apical est convexe et épaissi par des réserves de membrane plasmique qui lui donnent souvent une teinte plus sombre. L'épithélium est extensible et son épaisseur varie en fonction de la distension vésicale. La forme des cellules change également: lorsque la vessie est remplie, les cellules, surtout les plus superficielles, s'aplatissent et s'allongent grâce à leur réserve membraneuse.

Dans cette micrographie électronique, les réserves membraneuses apparaissent sous forme de vésicules discoïdes, claires, délimitées par une membrane trilaminaire particulièrement épaisse dont le feuillet luminal (1) est plus dense que le feuillet cytoplasmique (2). La membrane cellulaire apicale a le même aspect. Cette structure caractéristique et les jonctions serrées entre cellules superficielles seraient responsables de l'imperméabilité de l'épithélium aux constituants de l'urine.

Le chorion peut être subdivisé en deux zones. La zone sous­épithéliale est formée d'un feutrage de fins faisceaux de collagène dans lequel les fibroblastes sont relativement nombreux. Elle est richement vascularisée. Les capillaires les plus superficiels sont étroitement appliqués contre l'épithélium et dissocient parfois les cellules de la couche basale, donnant l'impression, fausse, que l'épithélium est vascularisé. La membrane basale qui sépare l'urothélium du chorion est extrêmement tenue; rappelons qu'elle n'est mise en évidence que par les colorations aux sels d'argent et par la réaction P.A.S.

La zone profonde du chorion est faite de tissu conjonctif dense, aux faisceaux de collagène plus épais. Elle contient de fines fibres élastiques qui forment un treillis parallèle à la surface endoluminale.

La musculeuse de la vessie est particulièrement développée. Classiquement, on lui décrit trois couches; la couche interne est longitudinale; la couche moyenne, surtout développée vers l'avant, est circulaire; la couche externe est longitudinale. Cette subdivision en couches bien orientées n'est cependant que théorique. En réalité, beaucoup de faisceaux musculaires ont une disposition oblique, d'autres passent d'une couche à l'autre. Au niveau du corps de la vessie, la musculature présente donc plutôt une disposition en réseau, ce qui explique que dans une coupe de paroi vésicale l'orientation exacte des faisceaux est difficile à déterminer.

L'adventice est de nature conjonctive. Chez le jeune enfant, elle est fibreuse, comme le montre cette micrographie. Chez l'adulte, elle forme un matelas adipeux au sein duquel se trouvent des cloisons conjonctives denses contenant de gros vaisseaux et un important plexus nerveux. Au niveau du dôme de la vessie, l'adventice est recouverte par le péritoine qui comprend un mésothélium et son chorion.

7.2.3. Histophysiologie

Au niveau des orifices, la disposition des faisceaux musculaires est particulière: les faisceaux entourent ces orifices de boucles opposées intervenant dans la physiologie du remplissage et de la vidange.

Voici cette disposition au niveau de l'abouchement des uretères. La portion vésicale des uretères mesure entre 10 et 15 mm; elle traverse obliquement les différentes couches de la paroi vésicale postérieure et s'ouvre par une fente taillée en biseau. La boucle A est formée par la couche musculaire longitudinale externe de l'uretère; elle passe en arrière de l'orifice urétéral. Sa contraction, déclenchée par un stimulus d'étirement lors du passage d'un jet d'urine, redresse la portion vésicale de l'uretère et ouvre l'ostium.

Au fur et à mesure que l'urine s'accumule dans la vessie, la pression qu'elle exerce sur la paroi augmente et écrase la partie intra­pariétale de l'uretère, empêchant ainsi le reflux urinaire. Cet effet est renforcé par la contraction des muscles du trigone formant la boucle B qui passe au­devant de la portion vésicale.

Au niveau du col vésical, les faisceaux musculaires lisses forment aussi deux boucles. La boucle A qui contourne le col par l'arrière s'insère à la partie basse de la symphyse pubienne; c'est le muscle pubo­vésical. La boucle B qui contourne le col par l'avant est formée par des faisceaux provenant de la tunique musculaire longitudinale externe de la vessie. Ensemble, elles forment le sphincter interne dont la contraction ferme l'ostium urétral.

L'ouverture de l'ostium est commandée par les muscles longitudinaux du trigone (C) et par le muscle recto­vésical (D), bandelette lisse provenant de la tunique musculaire longitudinale du rectum et s'insérant au niveau de la partie postéro­latérale du col vésical.

L'action du sphincter interne est renforcée par le sphincter externe situe au niveau de l'urètre. Ce sphincter volontaire est formé par des boucles spiralées ascendantes de faisceaux musculaires striés émis par le muscle périnéal transverse profond (E).

7.2.4. Innervation

L'innervation de la vessie est double: orthosympathique et parasympathique. La localisation précise des centres médullaires et des relais ganglionnaires, ainsi que le trajet des voies efférentes et afférentes font encore l'objet de certaines controverses. La plupart des auteurs se rallient cependant au schéma suivant.

Les fibres orthosympathiques efférentes (représentées en rouge) partent de centres médullaires situés au niveau des segments D12­L1­L2. Elles empruntent les rameaux communicants blancs, passent par la chaîne ganglionnaire prévertébrale et les nerfs splanchniques lombaires et font synapse soit dans le ganglion mésentérique inférieur (1) soit dans le plexus hypogastrique inférieur (2). Les fibres postganglionnaires se ramifient dans la paroi vésicale. Lors du remplissage de la vessie, la stimulation du système orthosympathique entraîne un relâchement de la musculature du corps et donc une distension vésicale sans augmentation exagérée de la pression. En même temps le sphincter interne se contracte; le nombre de fibres impliquées dans cette contraction est fonction du degré de distension.

Les fibres parasympathiques efférentes (représentées en bleu) proviennent des segments S2­S3­S4 (centre de Budje). Elles empruntent les nerfs splanchniques pelviens et rejoignent les ganglions du plexus nerveux situé dans la paroi vésicale (3). Le système parasympathique est stimulé lorsque la distension vésicale atteint un certain seuil. Ceci provoque la contraction de la musculature vésicale et le relâchement du sphincter interne.

Le sphincter strié externe, volontaire, est innervé par des fibres en provenance de motoneurones voisins du centre parasympathique. Ces fibres (représentées en vert) empruntent le nerf honteux interne.

Les voies afférentes, sensorielles, suivraient les mêmes trajets en sens inverse.

7.3. Urètre

7.3.1. Rappel anatomique

L'urètre masculin est un canal d'une longueur de 18 à 20 cm par où s'écoulent à la fois l'urine et le sperme. Il s'agit donc d'un conduit uro­génital. Dès son origine l'urètre s'engage dans la prostate; il la traverse de haut en bas puis traverse l'aponévrose périnéale moyenne et devient extra­pelvien. Dans son trajet extra­pelvien, il est entouré d'un manchon de tissu érectile dénommé corps spongieux. On peut ainsi décrire à l'urètre trois parties : l'urètre prostatique (1), l'urètre membraneux (2) et l'urètre spongieux ou pénien (3).

Au niveau de la paroi postérieure de l'urètre prostatique se trouve une petite élévation allongée, le veru montanum (1). Chez 10% des hommes, il existe au milieu de cette élévation une cavité, l'utricule prostatique (2), vestige du canal de Muller et homologue rudimentaire de l'utérus. De part et d'autre de cette structure, on trouve l'ouverture des deux canaux éjaculateurs (3). Les nombreux canaux prostatiques s'ouvrent dans les sinus prostatiques (4), gouttières qui flanquent le veru montanum.

7.3.2. Histologie

La portion prostatique de l'urètre est tapissée par un épithélium urinaire identique à celui de la vessie. Dans la portion membraneuse, on décrit habituellement un épithélium cylindrique stratifié ou pseudostratifié. Cet épithélium devient cylindrique bistratifié et même simple dans son trajet spongieux comme le montre cette micrographie. Au niveau de la fossette naviculaire, il se transforme en épithélium épidermoïde. Des plages epidermoïdes circonscrites peuvent aussi être observées tout au long de la partie spongieuse.

L'épithélium de l'urètre spongieux présente des dépressions dont la paroi est riche en cellules de type mucipare; c'est dans ces lacunes que s'ouvrent les glandes de Littré dont une est visible sur cette micrographie. Il s'agit de petites glandes acineuses ou tubulo­acineuses formées de cellules à sécrétion muqueuse destinée à lubrifier l'urètre; elles sont situées dans le chorion et pénètrent parfois profondément dans le corps spongieux.

Le chorion est riche en tissu conjonctif lâche et contient beaucoup de fibres élastiques.

Au niveau de l'urètre spongieux, la partie externe du chorion et la musculeuse adjacente sont infiltrées de lacs veineux (1), séparés par des trabécules fibro­élastiques riches en cellules musculaires lisses (2) et alimentés par des artères à coussinet (3). Ce corps spongieux est un tissu érectile identique à celui des corps caverneux. Nous le décrirons plus en détail dans le chapitre consacré à l'appareil génital mâle.

Au niveau de la partie spongieuse, il n'y a donc pas de musculeuse bien individualisée. Celle­ci n'existe que dans la partie prostatique et membraneuse où elle est formée de cellules musculaires lisses surtout longitudinales avec quelques cellules circulaires en périphérie. La portion membraneuse est en outre entourée d'une masse de muscle strié formant le sphincter externe.

L'urètre féminin est court ( 2 à 5 cm) et sa structure histologique est simple. L'épithélium est de type urinaire dans la portion juxta­vésicale et acquiert les caractéristiques d'un épithélium cylindrique pluristratifié ou pseudostratifié dans la portion distale. Au niveau du méat urinaire, il est suivi par l'épithélium épidermoïde de la vulve. Le chorion est lâche et irrigué par un important plexus veineux. Il contient de petites glandes muqueuses périuréthrales, les glandes de Skéne, homologues des glandes de Littré. La musculeuse lisse comporte une couche interne longitudinale et une couche externe circulaire. Au tiers moyen de l'urètre, le sphincter strié entoure le manchon musculaire lisse.

Nous avons ainsi terminé l'étude du système urinaire.